Que faut-il entendre par « la vie éternelle » ?

Publié le par la rédaction

La vie éternelle
 
Le Nouveau Testament parle très souvent (environ 40 fois) de « vie éternelle ». Ainsi, l’évangéliste Jean (ch. 3 v.16) affirme que Dieu a envoyé son fils pour que « ceux qui croient en lui ne périssent pas, mais qu'ils aient la vie éternelle », et Paul écrit dans l'épître aux Romains (ch. 6, v.23) que la vie éternelle est le don que Dieu nous fait en Jésus Christ.
 
Que faut-il entendre par cette expression « la vie éternelle » ?
 
1. Une vie présente
 
Quand on parle de « vie éternelle », il ne faut pas penser tout de suite à une vie dans l'au-delà, qui commencerait après notre décès, qui concernerait ceux qui sont morts à la vie terrestre.
« Vie éternelle » désigne une existence transformée parce que Dieu y est présent, parce que le Christ l'habite et l'oriente, parce que l'Esprit l'anime. Elle commence dès à présent, dans notre vie actuelle et dans notre monde. « Celui qui croit, a la vie éternelle » dit Jésus (Jean, Ch. 6 v. 47). Il n'emploie pas un futur. Il ne dit pas que le croyant aura la vie éternelle, mais bel et bien qu’il l'a. Quand on vit en fonction de Dieu, pour le Christ, au service du prochain, on est dans la vie éternelle. Notre existence n'est plus seulement charnelle (c'est-à-dire dominée par nos intérêts et le souci de nous-mêmes), elle devient spirituelle (c'est-à-dire transformée et renouvelée par l'action de l'Esprit).
 
2. Présent et à venir
 
Cette présence et cette actualité de la vie éternelle sont essentielles. Le reste vient après et est secondaire. Les êtres humains se sont toujours beaucoup préoccupés de ce qui suit leur décès (il suffit de voir dans une librairie le nombre de livres qui en traitent pour constater que cette question reste très présente dans notre monde). Cette préoccupation, tout à fait légitime, ne doit pas détourner notre attention de ce que nous vivons et avons à faire aujourd'hui. Jean Calvin a écrit que le chrétien ne se conduit pas comme des « gendarmes » (soldats) qui « ont déjà fait leur temps » et qui ne pensent qu'à leur retraite. Le croyant se concentre d'abord, en priorité, sur ce que Dieu lui donne de vivre aujourd'hui et sur les tâches qu'il doit accomplir. Toutefois, pour le Nouveau Testament, la vie éternelle ne se limite pas à notre existence physique dans ce monde. Elle a une dimension future. Elle se continue au-delà de notre décès. Si la préoccupation de l'avenir ne doit pas nous faire oublier l'importance du présent, à l'inverse, l’attention à donner au présent n'écarte pas ni n'élimine la question de l'avenir.
 
3. Après la mort
 
Partout, dans toutes les civilisations et à toutes les époques, on a voulu se représenter l'au-delà. On a imaginé des itinéraires, tantôt effrayants, tantôt rassurants, qui conduisent de la vie terrestre à l'existence de l'au-delà à travers diverses étapes (séparation de l'âme et du corps, jugement, purgatoire, traversée d'un tunnel, apparition d'un être de lumière, etc....)
 
Il faut bien reconnaître que ces descriptions ne reposent pas sur grand chose. On ne peut ni en vérifier l'exactitude, ni les réfuter. Il nous faut admettre et accepter notre ignorance. De l'au-delà, nous ne savons rien. Si nous en connaissions quelque chose, ce ne serait précisément pas l'au-delà.
 
Le Nouveau Testament ne donne aucune description de la vie après la mort. Il se contente de l'affirmer et de l'évoquer à travers des images et des paraboles qui ne nous dévoilent pas ce qu'elle est, mais qui nous en donnent, selon une expression de Jean Calvin, « un goût » (un goût et non un savoir).
 
4. La résurrection des corps
 
Le symbole dit des Apôtres entend résumer le message du Nouveau Testament sur ce point (et tout particulièrement le chapitre 15 de la première épître aux Corinthiens) par la formule suivante « je crois en la résurrection des corps ».
Pour ma part, je ne prends pas cette formule à la lettre. J'y vois une image qui donne quelques indications.
 
Que nous dit-elle ?
 
   a. On parle de « résurrection », pour souligner que la vie éternelle, comme d'ailleurs la vie physique, nous est donnée par Dieu. Nous ne la possédons pas. Nous la recevons et ne devons jamais oublier de qui nous la tenons. Le christianisme a évité de parler de « l'immortalité de l'âme », expression qui laisse entendre que la vie éternelle appartiendrait naturellement à notre être, ou à une partie de notre être. Par nous-mêmes nous ne sommes que mort ou néant. Notre être n'est pas en nous. Dieu nous le confère. Il a suscité la vie lors de la création ; il la ressuscite à tout moment dans le monde et au delà de ce monde.
 
  b. Par corps, il ne faut pas entendre notre cadavre qui est destiné à la décomposition. La mention du corps ici signifie deux choses :
 
- d'abord, que la finitude humaine persiste dans la vie éternelle. Nous y restons des êtres limités, comme nous le sommes dans la vie présente par notre corps. Il ne faut pas concevoir l'entrée dans l'au-delà comme une sorte de divinisation qui nous rendrait infinis et nous ferait participer à l'essence divine. Nous sommes des créatures et nous le demeurerons.
- ensuite, que notre identité et notre personnalité ne disparaissent pas. En effet, notre corps fait de nous des êtres distincts, reconnaissables, séparés des autres par une frontière nette, et formant une unité.
 
Paul parle de « corps spirituel » (1 Cor. ch. 15, v. 44) expression que ne reprend malheureusement pas le symbole dit des Apôtres. Elle indique qu'une transformation profonde s'opère. La vie éternelle ne consiste pas seulement dans le prolongement ou la continuation de la vie actuelle. Elle est une autre forme d'existence.
 
5. Affirmation et prudence
 
Il faut sans doute se garder d'en dire plus. Peut-être même suis-je allé trop loin ! L'affirmation que la vie après la mort, comme notre existence actuelle, nous vient de Dieu devrait nous suffire. Nous ne somme pas, et nous ne serons jamais en état de la décrire, de dire en quoi elle consiste et comment les choses s'y passent. Et finalement, cela n'a pas grande importance car la foi ne communique pas un savoir, elle invite à la confiance.   
                    
Ne spéculons donc pas trop sur l'au-delà, et ne nous détournons pas de ce qui est au cœur de l’Évangile : la vie nouvelle que le Christ fait surgir en nous dès maintenant, dès ici-bas, vie dont nous croyons qu'elle ne se terminera pas à notre décès.
 
André Gounelle,
professeur émérite de la Faculté libre de théologie protestante de Montpellier
 
Source : Profils de libertés
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