L’amour et la vérité se rencontrent, la justice et la paix s’embrassent

Publié le par Jean Besset

Culte au Temple de l'EPU de Montélimar,
 
le 25 novembre 2017
 
 
Réflexion sur l’entretien entre Jésus et Pilate rapporté en Jean 18, 37-38
 
Prédication de Jean Besset,
pasteur de l'Église protestante unie de France
 
 
Avant de commencer cette méditation sur la vérité, je vous recommanderai de mettre dans un coin de votre mémoire, ce verset emprunté au psaume 85 « L’amour et la vérité se rencontrent, la justice et la paix s’embrassent »
Qu’est-ce que la vérité demande Pilate ? Cette question ne demande pas forcément une réponse, car pour lui la vérité c’est l’obéissance aveugle à l’autorité romaine. S’il pose la question ainsi c’est que malgré tout il pense qu’il peut y avoir une autre réponse moins radicale. Quoi qu’il en soit, même s’il ne sait pas vraiment ce que recouvre cette notion de Vérité, c’est quand même au nom de cette vérité qu’il gouverne cette province sans scrupule. C’est en son nom qu’il fait tomber les têtes qui le dérangent, et que Jésus sera crucifié.
Depuis des millénaires, on ne sait toujours pas au nom de quelle vérité le monde est géré. On vient de commémorer, il y a quelques semaines une guerre qui fut livrée, gagnée ou perdue, suivant le camp où se trouvaient engagés nos grands-parents, au nom d’une vérité pour laquelle on a envoyé des hommes à la mort. On ne savait pas vraiment ce qu’elle représentait puisque suivant le camp auquel on appartenait elle se formulait en termes différents.
Si nous nous interrogeons nous-mêmes pour savoir comment nous nous situons, nous serons sans doute obligés de constater que nous adhérons bien souvent à des vérités, toutes relatives, généralement provisoires et pas toujours fondées. Pourtant elles déterminent nos actions et elles cautionnent nos attitudes, comme si elles étaient des absolus incontournables.
Nous cherchons à en en attribuer l’origine à Dieu et nous engageons souvent toute notre vie à en défendre les principes. Pourtant, d’autres s’appuient sur d’autres principes que les nôtres pour défendre une autre vérité qui recouvrent les mêmes absolus.
Mais le Dieu au nom duquel nous fondons une telle vérité, qui est-il ? Quelle est cette vérité que nous défendons en son nom au point de mettre notre vie et aussi celle des autres en cause ? Les Écritures présentent Dieu sous des aspects différents qui ont parfois du mal à s’accorder entre eux si bien que nos confessions de foi rendent des sons discordants à son sujet. Nous avons l’habitude de le présenter comme omniscient, tout puissant, créateur de toute chose. Quelles preuves en avons-nous car nous voyons rarement se manifester les effets de ces affirmations concernant Dieu.
Pour affirmer de telles vertus nous ne pouvons nous appuyer que sur notre foi. Or, sans preuve il est difficile d’en affirmer la vérité, pourtant c’est en son nom que nous jugeons la vie des autres.
Cependant les Écritures cachent aussi Dieu derrière d’autres affirmations, qui sont parfois en contradiction avec celles que l’on vient de dire et qui ne sont pas plus démontrables. Il s’agit de son amour pour nous et de son intérêt constant pour l’humanité. Au nom de cette vérité nous affirmons, sans pouvoir le prouver, que c’est lui qui met sa réalité divine en cause pour amener les hommes à la vraie vie. La notion de vérité forme alors un couple curieux avec la notion d’amour pour présenter l’absolu de Dieu. Le psaume 85 avait déjà abordé cet aspect des choses : « L’amour et la vérité se rencontrent, » y est-il dit, « la justice et la paix s’embrassent. »
Même quand on s’appuie sur Dieu, on se rend compte que l’on a de la peine à donner une définition cohérente de la vérité. Qui osera dire qu’il en sait suffisamment sur Dieu pour apporter un témoignage clair et cohérent ?
Comme nous ne sommes pas capables par nous-mêmes de faire fonctionner correctement ce couple Amour-Vérité, nous nous contentons alors d’une vérité toute relative pour approcher la vérité absolue de Dieu. Et si nous parlons de vérité relative autant parler de fausse vérité ou même de mensonge, comme nous allons le voir. Car pour dire la vérité, nous cherchons continuellement à l’adapter à notre situation du moment.
Si nous parlons de vérité, même de vérité sur Dieu, telle que les Églises de la Réforme prétendent la définir, elle s’opposera forcément à une autre vérité qui est celle de l’Église catholique qui cherche le même but. Cette prétendue vérité des Réformateurs, c’est celle aussi qui a mené à la mort Michel Servet, c’est également elle qui a mis en cause les anabaptistes et les a exilés hors d’Allemagne, c’est elle qui a conduit au bûcher les sorcières de Salem, c’est elle qui impose aux autres un visage de Dieu déformé par le bon droit des uns, les prétentions des autres, la clairvoyance des plus sages et la cupidité des masses.
Mais cette vérité, aussi noble soit-elle ne saurait prétendre à l’absolu car elle ne repose que sur l’approche humaine de la réalité. Elle n’est pas vérité de Dieu.
Au couple Vérité-Amour qui caractérise Dieu nous voyons s’opposer un autre couple celui de Vérité-Mensonge que l’on vient d’aborder. Un fossé nous sépare donc de Dieu en la matière et nous sommes toujours tentés de ne pas savoir en apprécier la profondeur.
Pour mieux résister nous banalisons la vérité au point d’en faire un simple élément de rhétorique et nous nous laissons aller à des lieux communs pour mieux masquer le problème : « la Vérité sort du puits », disons-nous ou « elle sort de la bouche des enfants ». Les plus savants disent « in vino veritas ». On la prétend insaisissable telle une anguille dans l’eau vive. On rajoute que toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire. Guy Béart a mieux cerné le problème quand il a dit : « le poète a dit la vérité, il sera exécuté ».
Ne maîtrisant pas la situation, le gouverneur Ponce Pilate s’est fait apporter une cuvette d’eau, selon l’Évangile de Matthieu, pour mieux noyer la vérité et laisser exécuter Jésus sans trop mauvaise conscience.
Les accusateurs de Jésus se cachent alors derrière le mensonge pour dissimuler la vérité, ils disent que c’est lui qui s’est proclamé roi et qu’ils n’ont que César pour souverain. Les menteurs ! Ils détestent César et nourrissent une haine implacable contre lui. Ils mentent pour donner des arguments à leur vérité. La prétention de Jésus à être roi ne les intéresse pas mais donne un argument à Pilate et une raison de tuer Jésus, c’est ainsi que leur fausse vérité s’associe au mensonge et devient porteuse de mort. Quant à Pilate qui reconnait n’avoir aucun argument pour envoyer Jésus à la mort, il le condamne quand même et il ment lui aussi pour complaire à ses accusateurs mensonge encore.
Il n’y a que l’amour qui permette de ne pas trahir la vérité par le mensonge. Car l’amour pour autrui est le seul moyen pour ne pas trahir les hommes au nom d’une vérité quelle qu’elle soit. Une telle attitude nous amènera à découvrir comment, par l’amour que l’on porte à autrui, Dieu peut habiter le monde.
Nous devons garder en mémoire que dans le monde des mortels où nous sommes, il n’y a aucune vérité absolue, pas même sur Dieu. Nous pouvons l’approcher cependant en nous appuyant sur Jésus Christ qui par amour nous apprend à toujours aller plus loin, car il ne peut y avoir de vérité sans amour pour les autres. Il ne peut y voir de vérité absolue sans amour absolu ! Sans amour nous n’aurons aucune prise sur la vérité. Quant à Dieu lui-même, il attend que nous l’ayons rejoint de l’autre côté pour nous révéler la Vérité absolue dans sa réalité.
Amen
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Publié dans Prédications, Jean Besset

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D
L'un des plus beaux textes spirituels qu'il m'ait été donné de lire - ou plutôt d'entendre, car sa force est telle que j'ai eu en maints endroits l'impression qu'une voix, oh combien convaincante, me parlait. Pour finir sur cet énoncé, qui devrait être gravé partout où s’élève un étendard ou un repère pour la tolérance, et pour l'intelligence de la foi : " Quant à Dieu lui-même, il attend que nous l’ayons rejoint de l’autre côté pour nous révéler la Vérité absolue dans sa réalité"..
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